Pépites vidéo

▴ Rencontre avec Sylvain Gressier

[2017] Chaque année, au sein de nombreuses associations et écoles, des films sont réalisés par des non-professionnels : enfants, adolescents, primo-arrivants, SDF, minorités… des personnes qui n’ont pas toujours l’occasion de faire entendre leur voix. Une fois que ces films existent, ils sont rarement montrés à un public, car l’enjeu des ateliers vidéo est souvent la rencontre, l’apprentissage et l’émancipation plus que le résultat final. Or, la galaxie des vidéos d’ateliers regorge de belles perles. Benoît Brunel, chargé de médiation au BRASS et Sylvain Gressier, de la plateforme Ça tourne ont eu l’idée de donner à voir ces pépites lors d’une journée de festival au BRASS. La première édition du festival FABRIQUE se déroulera donc le 19 mai. Au programme : réalisation collective de films et projection de vidéos réalisées dans le cadre de divers ateliers en Belgique francophone. Éclairage de Sylvain sur le sens de la pratique vidéo, en particulier chez la génération née avec internet.

Au quotidien, Sylvain Gressier gère une plateforme de diffusion de films (www.ca-tourne.be), sorte de YouTube spécialisé en vidéos d’ateliers. Cette plateforme se focalise en premier lieu sur les films réalisés par des jeunes. « Un des principaux enjeux de notre travail, explique-t-il, c’est de faire entendre ce que les jeunes ont à exprimer au travers du médium vidéo. L’autre axe fondamentalement lié au premier, c’est l’éducation à l’image, c’est-à-dire donner les outils pour comprendre de quoi et pour quoi sont faits les films.”

 

Sylvain, tout comme Benoît, est persuadé qu’à l’heure des fake news (fausses informations qui circulent sur le web), pour avoir un recul critique sur les images qui nous entourent, il faut mettre les mains dans le cambouis : “La plupart des gens se posent simplement en tant que spectateurs et consomment les images à tire-larigot. Or, fabriquer soi-même des films permet de mieux comprendre ce qu’on voit et de saisir l’opportunité de s’exprimer.”

“La vidéo n’est pas seulement quelque chose qu’on consomme. C’est aussi une chose qu’on fabrique.”

En regardant quelques années en arrière, Sylvain souligne la complexité de trouver un rapport sain et constructif aux écrans : « Il y a une vingtaine d’années, on se disait que la démocratisation d’internet était magnifique. Quelle chance ! Quel champ des possibles extraordinaire ! On pensait qu’en étant né avec le numérique, on en capterait nécessairement les codes et on serait capables d’avoir du recul. Je crois qu’on a confondu la capacité technique d’utilisation d’internet avec la capacité d’analyse critique”. Sylvain se rend à l’évidence d’une certaine déroute par rapport à cette euphorie des débuts :
«Aujourd’hui, nous sommes morts d’inquiétude en voyant nos gamins passer leur temps devant leurs smartphones, devant internet, ils évoluent dans un environnement sur lequel on a aussi peu de connaissances que d’emprise. »

En définitive, le sens de ce festival, estime Sylvain, « c’est clairement de dire : « Regardez : la vidéo n’est pas seulement quelque chose qu’on consomme. C’est aussi une chose qu’on fabrique. Vous pouvez exprimer dans un film ce que vous avez à dire. Et dans les films qui vous sont montrés, il y a toujours un message. Lequel ? » »